Interview de Marc De Douvan par Jean Noël Delmotte, donnée le 26 septembre 2011 pour le périodique de l'association C.O.E.U.R. de la région de Mons en Belgique:
Jean Noël Delmotte: A quel âge as-tu commencé la batterie et l'étude des tambours militaire ?
Marc De Douvan: A un âge relativement tardif de 18 ans. C'est grâce à la rencontre d'un étudiant en percussion classique, dans le foyer de jeunes travailleurs et étudiants où je logeais, quand je suis monté à Paris pour mes études d'arts appliqués. Je me suis donc mis tout naturellement aux premiers rudiments, en autodidacte, en tapant sur une chaise avec des baguettes, mais aussi tout de suite à la batterie (il y avait deux studios avec batterie dans ce foyer qui accueillait beaucoup de musiciens étudiants provinciaux), et j'ai progressivement appris des rudiments plus complexes en écoutant des disques puis plus tard avec la vidéo "Back to Basics" de Dave Weckl et surtout en cherchant par moi-même et en écoutant des disques. Je n'ai acheté ma première méthode de tambour sérieuse que tardivement pour me rendre compte que je pratiquais déjà tout ça et bien plus, depuis longtemps (Robert Tourte, méthode officielle du CNSMDP*). "Stick Control" ou la méthode d'exercices de Kenny Clarke ainsi que les méthodes Agostini, je les ai juste feuilletées (mais en détail, le solfège rythmique avec les yeux d'un plasticien, ça se lit très vite!) assez tôt dans ma pratique, et je les ai trouvées désordonnées, indigestes et finalement pas très instructives, surtout que c'est la batterie avec pédales, l'indépendance et l'improvisation qui m'intéressaient (autrement dit: le jazz), pas le tambour classique ou le déchiffrage.
JND: Quel a été ton premier instrument de percussion joué sans les baguettes?
MDD: Un mini djembé pour enfant acheté au marché aux puces à 19 ans, donc ma pratique des percussions digitales a pratiquement toujours été conjointe de ma pratique du jeu avec baguettes.
JND: As-tu fait partie d'un groupe avec des copains et si oui, dans quel genre musical?
MDD: Au début, je jouais en improvisant des percussions avec mon ami étudiant percussionniste au c.n.s.m.d.p. *, Stéphane Mondésir, avec qui j'ai aussi travaillé en duo de jazz, piano/batterie, et aujourd'hui pianiste professionnel de jazz avec Ahmad Compaoré. La pratique du djembé était tout aussi nouvelle et enthousiasmante pour lui que pour moi à l'époque! J'ai aussi participé à plusieurs groupes de variété et de rock français semi professionnels ou débutants notamment au Sentier des Halles à Paris (avec reprises et chansons originales). Même si le jazz restait ma préférence, j'étais curieux d'aborder un style "apparemment" à l'opposé dans la pratique: un bon moyen pour trouver des idées et ne pas s'enfermer dans des clichés stylistiques et une forme de maniérisme ou complexe de supériorité, parce que le rock peut être beaucoup plus sophistiqué qu'il n'y parait, il suffit d'écouter attentivement Mitch Mitchell, Bill Bruford, Steve Gadd, John Bonham, Vinnie Colaiuta, Nicko Mac Brain, Jeff Porcaro ou Bernard Purdie.
JND: A quel âge as-tu découvert le jazz?
MDD: Difficile question: mon père était fan de be bop donc, probablement dans le ventre de ma mère! Un moment important a été la découverte de l'album "Moanin'" de Art Blakey dans la collection de disques vinyle de mon père, au collège, quand j'ai commencé à m'intéresser vraiment à la musique autre que la variété assez médiocre qu'on entendait en boucle à la radio et à la télévision, tout en écoutant aussi du rock progressif et de la musique dite classique et moderne (symphonique) notamment en concert. Art Blakey est le premier batteur qui a suscité mon admiration: ce n'était pas juste un accompagnateur mécanique mais un vrai orchestre à lui tout seul avec un sens de la mélodie et du rythme très dramatique si je puis dire (écouter "The drum thunder suite" sur Moanin') et un super swing de blues. Mais la vraie révélation cela a surtout été Max Roach, Elvin jones et Jack De Johnette vers 19 ans: là j'ai compris ce que c'était qu'un batteur vraiment accompli comme musicien et je les ai beaucoup écouté et copié.
JND: Comment es-tu entré chez Aquarella?
MDD: Encore grâce à mon ami du c.n.s.m.d.p.* qui jouait déjà dans un groupe de percussionnistes contemporains (Inda, sous la direction de Pascal Delage, aussi compositeur, batteur et prof en conservatoire, ancien élève de Georges Paczynski) et dont un des membres faisait déjà partie d'Aquarela: c'est ce dernier qui m'a introduit à l'essai dans le groupe après avoir "boeuffé" avec moi au djembé. Dès la première séance de répétition j'ai été chaleureusement adopté à l'agogo et une semaine après je participai déjà à mon premier carnaval à Sevran (c'est ce qui s'appelle de l'apprentissage "sur le tas", mais attention aux apparences, bien qu'oral, l'enseignement à Aquarela était très pointu, comme j'ai rarement entendu en France, aussi parce que certains membres étaient brésiliens et avait appris la samba au Brésil, et d'autres avaient fait partie de la première école de samba créée en Europe par une universitaire brésilienne: Nicia Riba d'Avila). Ce n'est que plus tard que je me suis mis sérieusement à la "caixa" (caisse claire en brésilien) en travaillant mes roulements tous les jours au moins une heure en dehors de mes cours de faculté d'arts plastiques. J'ai aussi appris les autres instruments de percussion brésiliens ensuite. J'ai eu la chance de participer à ce groupe à ses balbutiements, quand il n'était même pas encore fondé en association, et d'avoir joué au carnaval de Londres et d'Amsterdam entre autres, avec lui.
JND: Comment es-tu passé des percussions brésiliennes, aux percussions afro-cubaines diamétralement différentes dans leur méthodes?
MDD: Bonne question! Je tiens d'abord à préciser pour les néophytes, qu'aucun instrument brésilien n'est commun à un instrument cubain, et il en va quasiment de même pour les techniques de jeu et les rythmes de base traditionnels. En général on classe tout ça en France dans un fourre tout galvaudé appelé musique "latine" (qui n'a souvent plus rien à voir avec l'original), et c'est un tort, cela dégrade la sophistication, l'originalité et la richesse souvent sous estimée de ces deux cultures. C'est grâce à un ancien élève d'Orlando Poleo (percussionniste vénézuelien installé à Paris) que j'ai appris. Il me montrait des trucs cubains et en échange, je lui montrais des trucs brésiliens: c'était du troc culturel en quelque sorte! On s'est rencontré quand je faisais mon service militaire "civil" dans un lycée de Saint-Denis où il travaillait, et le proviseur m'avait permis de monter un atelier de percussions brésiliennes entre les cours, qui a joué avec Oumou Sangaré (célèbre chanteuse malienne) sur scène à la fin de l'année. Ce fut une de mes premières expériences de pédagogue "pour les autres", mais j'avais déjà donné des cours particuliers de batterie et joué 3 ans avec Aquarela en faisant le tour de tous les instruments brésiliens de carnaval.
JND: Parles-tu portugais et l'espagnol en dehors de l'anglais et du français bien évidemment?
MDD: Malheureusement non, et les langues étrangères sont parmi les rares domaines intellectuels qui ne m'ont jamais vraiment intéressés (la logique y est quasiment absente!). En plus, ma première langue étrangère pratiquée est l'allemand (ma mère est allemande) mais j'ai toujours été nul dans cette langue malgré les heures de travail passées! La musique n'est pas un langage contrairement aux apparences (même si des codes existent), et les musiciens brésiliens que j'ai eu la chance de rencontrer et avec qui j'ai joué, parlaient tous parfaitement français. Heureusement, la musique ne se transmet pas non plus par les gènes, car je n'ai aucune ascendance ni africaine, ni portugaise, ni américaine, ni espagnole. Ma mère est d'origine allemande huguenote (donc française en fait) et polonaise, et mon père, russe et lettone (et je ne parle pas non plus ces langues!). En fait la culture musicale qui m'a attirée l'a été uniquement pour des questions de sensibilité, de goût. Pas besoin d'être caribéen pour aimer le piment ou de comprendre les paroles d'une chanson pour aimer sa musique!
JND: Comment as-tu rencontré Orlando Poleo?
MDD: Je ne l'ai malheureusement pas "rencontré", mais j'ai eu un échange par Email avec lui grâce à Myspace. Une personne qui a l'air aussi sympathique, ouverte et chaleureuse que talentueuse (et qui parle aussi très bien français!). Myspace est un outil formidable car il est d'abord réservé aux professionnels de la musique, et sans ce filtre (et peut-être aussi le travail fait sur mon site), je n'aurai jamais pu contacter et converser avec une "star" aussi sollicitée que Horacio "El Negro" Hernandez, qui a finalement accepté de lire mes méthodes (en français encore) malgré un emploi du temps de "ministre", et qui m'a accordé ensuite un soutien critique extrêmement rare pour un auteur français de partitions pédagogiques. Pour quelqu'un qui n'a pas de diplôme de musique, c'était important d'avoir ce type de soutien d'estime sur mes méthodes, tout comme celui de Daniel Humair, Bertrand Renaudin, Jean-Philippe Fanfant, Thierry Arpino, Marc Cerrone, Jean-Claude Paolini ou Martial Solal, qui jouent dans des styles bien différents et sont parmi les meilleurs dans le genre qu'ils pratiquent.
JND: Comment en es-tu venu aux instruments africains ?
MDD: Après la flûte à bec (à 6 ans (qui m'a vite dégoûté de la musique) et le chant choral au collège), le premier instrument que j'ai pratiqué sont les tambours du Congo, les ancêtres des congas, avec les ballets africains Kodia (vers 12 ans). En fait, j'ai commencé par la danse africaine (en stage d'été quotidien aussi avec Kodia) avant la musique africaine, et c'est une excellente expérience pour apprendre à écouter, sentir le tempo et prendre conscience des gestes de son corps et de l'espace. Mais je me suis vraiment mis sérieusement à la percussion africaine (par une pratique quotidienne d'au moins une heure par jour) avec mon djembé pour enfant, en abordant déjà l'improvisation, sans "tabou" scolaire ou partitions, ce que je conseille à tout le monde de faire, pour se décomplexer par rapport à la pratique musicale. La peur des "fausses notes" c'est ce qui tue l'art en musique, d'après moi. On n'a pas ce type de peurs dans l'enseignement des arts plastiques aujourd'hui: il est important aussi d'apprendre à désapprendre et se jeter avec confiance dans l'inconnu, l'expérimentation directe, et la confrontation avec les éléments, son corps et les instruments, tout en analysant ce qu'on fait, sans quoi il est impossible de devenir créatif d'une manière vraiment artistique, c'est-à-dire intuitive et non scientifique, rationnelle. J'aime les musiciens qui prennent des risques pour aller vers la créativité et le dépassement de soi, quitte à sortir du tempo ou de la mesure, ou en tout cas des savoirs déjà connus, ce qui est très "free jazz" comme approche et de toute façon beaucoup plus spécifiquement artistique. Le déchiffrage note pour note de la musique, c'est pour moi seulement de la technique, même si ce n'est pas inutile, pour se former, à condition d'avoir déjà une capacité d'analyse musicale, ce qui est rarement le cas quand on est débutant et si on ne reçoit pas d'explications complémentaires aux seules partitions. Etre un pur compositeur écrivain de partitions n'est guère mieux car on est alors déconnecté d'une appréhension physique de l'instrument. Séparer la tête du corps n'est jamais très sain. Pour moi, l'art le plus beau est issu de la virtuosité, d'une volonté de dépasser ses limites naturelles, et c'est aussi comme cela qu'on accède en général à la créativité car chacun trouve des stratégies personnelles pour y arriver (si il n'est pas entièrement téléguidé!). En Afrique, à Cuba ou au Brésil, l'enseignement des percussions se fait de manière orale et visuelle (par l'observation attentive des maîtres) mais pas avec des partitions, encore aujourd'hui, et l'improvisation, même si elle est très encadrée, est très libre et présente. Cela dit, je dois reconnaître que j'ai appris beaucoup de choses basiques en percussion mandingue, grâce à la méthode dictée par Mamady Keita et écrite par Ushi Billmeier ("Une vie pour le djembé"), qui possède aussi beaucoup commentaires textuels. L'art est sans doute le domaine qui fuit le plus toutes les règles et principes, c'est pourquoi c'est un des plus complexes qui soient. Abandonner cette complexité, c'est abandonner l'art lui-même, bien souvent.
JND: Combien as-tu mis de temps pour écrire tes deux méthodes pour batterie?
MDD: Un an et demi pour "Retour aux sources" (méthode pour niveau avancé, que j'ai écrite en premier) et 6 mois pour "Premiers pas". Mais en réalité il ne s'agissait que de la finalisation formelle et l'ordonnancement et la synthèse de 15 ans d'étude et pratique quotidiennes, en passant par l'analyse de milliers de disques et de dizaines de vidéos et de méthodes des meilleurs batteurs de l'Histoire et du monde, ainsi que de nombreuses rencontres artistiques. Presque tous les brouillons des méthodes existaient déjà avant, dans le désordre, et pour ne pas faire une méthode "fleuve" (près de 500 pages c'est déjà beaucoup), il a fallu que j'écrème et que je trouve des systèmes logiques de classement et de simplification, aussi pour ne pas enfermer le lecteur, l'élève, dans une interprétation univoque, ce qui aurait été non conforme à ma vision de l'art et son enseignement. C'est vrai pour toutes les oeuvres d'art, qui ne sont finalement que la somme à un instant "t" de toutes les expériences accumulées. La durée d'exécution d'une oeuvre ne dit pas grand chose sur le réel investissement de temps d'un artiste expérimenté: écoutez un solo de 1 minute de Horacio Hernandez ou de Dave Weckl et vous comprendrez de quoi je parle! C'est un principe très fort en peinture chinoise ou chez des artistes d'avant-garde comme Picasso, mais aussi Michel Ange, qui peignait "a fresco", dans l'urgence, contrairement aux apparences, tellement il était habile!
JND: Qu'est-ce que la batterie moderne par rapport à la batterie classique?
MDD: D'après ma propre définition, il s'agit d'une batterie jouée par un seul instrumentiste mais aussi avec des pédales et donc les pieds, le tout impliquant le jeu en indépendance, avec des superpositions de frappes ("accords" ou "unissons"). Ce concept est absent de la batterie classique (d'origine militaire) où chaque instrumentiste jouait de manière purement rythmique ou mélodique (une seule voix) sur un seul instrument (voire deux pour les timbales, conçues d'abord pour les cavaliers, une à chaque flanc de cheval). Je pense que la confusion des gens sur la fausse évidence que c'est la même chose, vient du fait que l'on confond des sources étymologiques: la "batterie d'artillerie" ou "de cuisine", qui suggère un grand nombre d'éléments et le mot vraiment originel qui est "battre". On bat du tambour ou du triangle, mais ce qu'on appelle aussi "batterie" en France (contrairement aux Etats Unis, où on met bien "drums" ("tambours") au pluriel pour désigner la batterie moderne) c'est l'ensemble des instruments (voire les compositions militaires, par extension): cymbales, tambours (ou caisse claires) et grosse caisse. Une autre expression consacrée est "batterie de jazz" en France, mais elle a été créée à un moment où c'était le seul style utilisant la batterie avec pédales. Aujourd'hui, cette expression est clairement désuète, et de fait, presque plus personne ne l'emploie, même si on la trouve dans les dictionnaires. Les américains disent couramment "drumset" (on voit ça sur beaucoup de titres de méthodes), et Jim Chapin a intitulé la première méthode entièrement consacrée à l'indépendance, "Advanced Techniques for the Modern Drummer" (en 1948, qui fut un bond en avant considérable dans la pédagogie de la batterie) ce qui ne sonne pas loin de "modern drums". "Modern Drummer" est aussi le nom du premier magazine consacré à la batterie moderne. La distinction est pour moi cruciale: on peut passer sa vie à pratiquer le tambour sans avoir commencé la phrase la plus simple de batterie (avec indépendance) et vice versa. J'ai rencontré beaucoup de batteurs de rock, même professionnels, qui ne savaient pas "rouler", la technique de tambour la plus élémentaire (en "papa maman" et avec des rebonds). Nommer les choses correctement c'est un premier pas vers leur maîtrise. Un violoniste virtuose peut faire des "pizzicati" occasionnellement, ça n'en fera pas pour autant un joueur de guitare virtuose. Il faut savoir hiérarchiser les priorités dans la pratique d'un instrument, c'est ce que j'ai tenté de faire dans "Premier pas" en étant un des premiers auteurs de méthode à aborder la batterie moderne pour débutant par l'indépendance et non le jeu sur tambour seul, qui n'est pas un préliminaire obligé contrairement à ce que pensent beaucoup de professeurs et pédagogues. A ce titre, je pense qu'il serait nécessaire d'avoir un diplôme de professeur de batterie et de percussions séparés (et lui-même divisé en catégories d'instruments de percussion: clavier européen, tambour militaire, percussion cubaine, africaine, etc.). Le diplôme de batterie n'existe toujours pas en France au niveau de l'enseignement et le tronc commun du diplôme d'Etat d'enseignement en "Percussions", le seul accepté en conservatoire, range l'examen de batterie (sous entendue "moderne") dans les options facultatives. Pas étonnant ensuite qu'on trouve dans les écoles publiques des professeurs qui apprennent uniquement le tambour ou ne connaissent pas les gestes efficaces les plus élémentaires de la pratique de la batterie moderne (j'ai eu plusieurs élèves qui ont vécu cela). Enfin, séparer comme actuellement en conservatoire français, la musique dite "actuelle" et le jazz est un non sens: le jazz actuel existe et la musique symphonique contemporaine est aussi actuelle. Un bon batteur de jazz ne peut pas ignorer le rock ou la musique latine et vice versa, car tous ces styles sont entremêlés historiquement et techniquement, et séparer tout cela dans l'enseignement participe à l'enfermement dans des carcans académiques: les soi disants "règles de l'art", expression bien désuète et anti créative, s'il en est. Il faut donc, je pense, se recentrer en percussions sur un classement d'enseignement par instrument (pratique) et non par style (théorie), comme toutes les autres catégories classiques d'art (peinture, sculpture, architecture, etc.), qui ont prouvées leur efficacité créative, sans laisser tomber dans l'oubli, les pratiques traditionnelles ou l'Histoire (être créatif ne consiste pas simplement à oublier le passé, bien au contraire, car beaucoup de choses ont déjà été faites et il faut respecter le travail de nos aînés, le conserver).
JND: D'où viennent toutes tes sources d'informations sur l'Histoire de la batterie et des percussions, que l'ont peut lire sur ton site?
MDD: Il y en aurait trop pour toutes les citer ici (ou même sur le site, je laisse le soin à chacun de recouper les sources si il le souhaite, avec Internet c'est assez facile). Toutes les sources sont bonnes à prendre, mais je me méfie des livres, qui passent nécessairement par la subjectivité de leurs auteurs, souvent plus littéraires que musiciens (j'y ai souvent lu des erreurs de jugements, des déformations ou des oublis graves). C'est pourquoi, j'ai souvent fait appel à mes oreilles et écouté beaucoup de disques dans tous les styles et époques, aussi grâce aux discothèques de prêt, et aiguillé par des anthologies, sinon cela m'aurait coûté une fortune et cela aurait été infaisable d'embrasser autant d'univers musicaux différents pour tenter une synthèse (surtout en menant parallèlement des études d'arts plastiques)! Je pense que j'ai dû au moins passer autant de temps à écouter la musique des autres, qu'à la pratiquer (aussi en mettant la télévision dans un placard: un gain de temps considérable!). Je peux néanmoins conseiller deux ouvrages que j'ai trouvé assez bons bien que encore succincts et pas 100% justes (mais quel ouvrage l'est?): "Jazz" de John Fordham, qui par ses nombreuses illustrations photographiques donne une impression un peu enfantine, mais c'est une synthèse vulgarisatrice très juste d'après moi, et "l'Odyssée du jazz" de Noël Balen, qui a vraiment une approche d'historien critique à l'affût des spécificités des artistes et de leur histoire intime (la batterie s'inscrit dans un contexte social et musical (d'autres instruments), c'était le but de mon "Histoire de la batterie" de les décrire). Le site Drummerworld m'a aussi été d'une grande aide, à condition de bien savoir lire l'anglais et, bien que je ne partage pas souvent ses analyses et conceptions, je dois reconnaître la foison documentaire de "Une histoire de la batterie de jazz" de G. Paczynski, qui ne m'a pas aidé dans la rédaction de mon "Histoire de la batterie" (j'ai lu ces livres après), mais plus pour certaines biographies et discographies présentées aussi sur mon site. De toute façon, ce texte très succinct sur mon site, n'est qu'une porte d'entrée très résumée et donc forcément très subjective et sans prétention d'exhaustivité ou d'analyse pointue (même si certaines réflexions sont parfois assez originales). On en apprend plus dans mes méthodes et en lisant les biographies de "grands batteurs", que j'ai écrites sur mon site également, qui sont éclairées par les autobiographies présentes sur leur site officiel voire wikipedia ou drummerworld, quand ils n'en ont pas, et l'aspect critique vient de ma propre lecture de leurs oeuvres (audio, vidéo ou partitions). En plus, il faut toujours se méfier des mots quand ils essaient d'enfermer la peinture ou la musique: c'est une entreprise perdue d'avance! Ecouter et regarder les oeuvres, c'est le travail essentiel d'apprentissage de l'Histoire de l'art, pour moi, et ça se passe souvent d'explication, d'autant que le but pour un praticien, n'est pas de recracher tout ça comme un perroquet ou un singe qui "plagie" mais bien de trouver des choses uniques, à soi, en transformant ce qu'il a ingurgité (ce qui n'empêche pas la pratique de la "citation").
JND: Comment t'es venue l'idée de ce site?
MDD: De mon webmaster et ami musicien (guitariste électrique) Olivier Meunier. Sans sa proposition de faire bénévolement tout l'aspect informatique technique, je ne l'aurais jamais fait. Je n'ai pas la passion de l'informatique, contrairement à lui, qui est même diplômé et professionnel maintenant (enfin, depuis peu, il se consacre entièrement au théâtre!). Il faut dire qu'au début, je n'avais pas prévu de passer un an de travail dessus (ça devait juste être un portail promotionnel pour mes cours), mais j'ai senti qu'une opportunité se dessinait, quand j'ai vu le peu de sites approfondis sur la question en langue française ou même internationalement, et Olivier y a vu l'occasion de se former en autodidacte en informatique (car une de fois de plus, les diplômes d'Etat étaient insuffisamment actualisés). Après sa création, j'ai eu le soutien immédiat de la Baguetterie et de Batteur magazine, qui m'ont mis en lien parmi très peu de sites en France, et j'ai été agréablement surpris de la réception des gens de plus en plus nombreux, des avis toujours positifs sur le livre d'or et des positionnements presque immédiatement en haut sur Google, pour des expressions clés liées à la batterie et aux percussions, et sans payer aucune pub. Cela m'a encouragé à ajouter des rubriques ou enrichir les biographies par exemple, comme ajouter une discographie sélective de près de 1500 oeuvres. Et puis j'aime bien cette idée très démocratique et libre d'expression d'Internet, c'est une bouffée d'oxygène dans un univers social et professionnel parfois pesant, avec ses institutions hiérarchisées, ses compétitions et "guéguerres" parfois bien mesquines et stériles pour tout le monde. J'y ai vu l'occasion d'exprimer mes idées parfois originales et "en marge" des systèmes institués, ce qui ne m'empêche pas de les argumenter et d'essayer d'être bien documenté. Cela dit, je ne prétends pas à la perfection et j'encourage à la critique: mon Email est sur mon site depuis le début (mais j'ai eu très peu de critiques en fait et j'ai parfois complété le contenu du site en conséquence).
JND: Quels sont tes projets pour l'avenir?
MDD: Me débarrasser de tendinites persistantes aux chevilles depuis plusieurs années, pour arriver à jouer en concert en tournée, en master class et enregistrer un disque avec un vrai travail de groupe pointu (dans un esprit "latin jazz illimité"), et aussi éditer une traduction anglaise de mes méthodes pour la vente internationale, vu que je les ai conçues à partir de méthodes elles mêmes vendues internationalement et en langue anglaise, en essayant d'apporter des nouveautés ou des améliorations. S'ensuivra naturellement une version anglaise de mon site, qui a déjà reçu les félicitations (par un Email qu'il m'a envoyé) du concepteur de Drummerworld (Bernhard Castiglioni), le site consacré à la batterie (moderne) le plus visité au monde.
* C.N.S.M.D.P: Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris.
© 2005 Marc de Douvan Crédits Mentions légales