Beaucoup de batteurs et percussionnistes, comme beaucoup d'artistes, sont amenés à poursuivre au moins deux activités quotidiennes de front.
Cela est en partie du à une caractéristique spécifique de l'art qui veut que le jugement artistique soit une chose difficile à effectuer et difficilement objectivable. En effet, ce jugement prête toujours à caution, soit parce que les critères de jugement sont subjectifs (et que c'est bien comme cela (= point de vue kantien ou hégélien)), soit parce que l'on peut considérer de multiples points de vue et critères dont l'adoption appartient finalement à chaque récepteur (auditeur, spectateur) et qui sont souvent indépendants les uns des autres (goût personnel, plaisir personnel, succès commercial, notoriété, impact géographique ou historique, créativité, transmission culturelle, représentation culturelle, complexité théorique, virtuosité technique, connaissances, connivence, communication, etc.).
Ce " flou artistique " du jugement implique une difficulté à déterminer une valeur unique, à juger de la qualité d'une oeuvre dans son ensemble, sans compter le jeu de la spéculation commerciale, inhérente à tout produit, dont je défie quiconque de comprendre et prévoir les mécanismes.
On peut ajouter encore une spécificité de l'art musical qui consiste en son aspect éphémère et unique, aspect amoindri, il est vrai, par les nouveaux médias plastiques que sont les disques (à peine 1 siècle d'existence). Cette spécificité tend à rendre encore plus difficile son jugement.
Tous ces aspects font de l'activité artistique une activité plus difficilement rémunérable que toutes les autres activités productives (car il est indéniable qu'elle l'est (tout art se manifeste par une " oeuvre " livrée à un public, aussi restreint soit-il)).
Certains invoquent la notion de plaisir personnel de l'artiste à produire ses oeuvres, pour justifier leur gratuité, ce que je trouve être un argument fallacieux et inique, car il sous-entendrait que l'activité artistique ne présente pas de difficulté ni de travail (au sens originel de " souffrances ", sacrifices (ceux de l'enfantement, étymologiquement)), ou pire, qu'elle est réservée à une élite douée de naissance (je m'inscris totalement en faux contre cette idée, qui exclurait toute notion de mérite, le mérite étant de surcroît, à mon avis, à la base d'un jugement de type moral).
D'autres expliquent hypocritement, plus que naïvement, à mon avis (car qui le croit encore à l'ère de la société spectacle, où l'art et l'artifice n'a jamais été si présent dans notre environnement) que l'art est " inutile ".
Enfin, et pour les motifs opposés, beaucoup d'artistes, préfèrent ne pas créer de lien entre leurs oeuvres et le monde commercial, pour rester totalement libre et indépendant dans leurs choix créatifs ou, considérant, comme beaucoup de scientifiques, que ses bienfaits doivent profiter et appartenir à tout le monde, sans discrimination économique.
Toutes ces raisons et motifs, expliquent sans doute pourquoi, il est si difficile pour un artiste de se faire rémunérer, aujourd'hui encore, et pourquoi l'oeuvre de l'amateur peut souvent être plus satisfaisante et objectivement de meilleure qualité que celle du professionnel. La seule caractéristique qui sépare en fait l'amateur du professionnel est la rémunération et ou, l'inscription dans un système économique et social (se manifestant par exemple par les impôts, taxes, subventions, prêts, reproductions, vente, droits d'auteur, brevet, etc.).
Voyons maintenant, concrètement comment on peut s'y prendre, pour gérer et choisir cette double activité.
Tout d'abord, il faut d'abord reconnaître que quelque soie l'activité productive à laquelle il se livre, un être humain doit au moins satisfaire aux nécessités de survie (manger, dormir, boire, s'habiller, se loger, etc.). Pour les raisons invoquées précédemment, l'artiste est souvent amené à faire un travail dit " alimentaire ", c'est-à-dire, qui satisfera purement à ces besoins primaires. Si il souhaite en outre s'inscrire dans une activité familiale (élever et faire des enfants surtout), cela augmentera ces contraintes et par voie de conséquence, la part de cette activité.
Mes conseils pratiques sont simples : (compte tenu de ce que nous avons dit sur les blessures)
On voit avec les conseils 1 et 2, qui sont contradictoires, à quel point tout principe et recette sont vains ici, et que la sensibilité à son corps et une grande capacité d'adaptation et d'analyse est primordiale pour choisir la bonne attitude. Certaines personnes préféreront s'aider d'un conseiller pour y arriver (médecin, kinésithérapeute, psychologue, partenaire, manager, " coach " et ou professeur, par exemple, comme pour une activité sportive de haut niveau).
Pour ma part, je préfère rester autonome en ce qui concerne ce jugement, considérant que la capacité d'autocritique est primordiale pour un artiste créateur et qu'elle se développe par l'expérience et la pratique, et aussi à cause de cette idée de " sclérose créative " due à l'hyper spécialisation d'une activité (voir mon premier texte philosophique à la rubrique " philosophie ").
Notez que l'enseignement de la musique apparaît comme une alternative évidente et idéale pour beaucoup d'artistes, ce qui permet d'exploiter leurs compétences, les transmettre et les entretenir (sans se surmener, car c'est en principe bien rémunéré et basé sur une activité théorique).
Enfin, il faut considérer deux aspects de l'être humain pour comprendre la nécessité même d'activité extra-artistiques, indépendamment d'une nécessité rémunératrice (c'est ce qu'on appelle les " loisirs " ou " divertissements "):
1 : il est impossible de se concentrer sans dommages et efficacement, pendant toute la période de veille (voir " entraînement ", " échauffements " et " sommeil ").
2 : il est nécessaire d'avoir une gestion équilibrée de ses émotions (qui sont principalement régies par des flux hormonaux automatiques, au niveau de glandes hormonales (hypophyse, hypothalamus, etc.) pour ne pas devenir dépressif, agressif ou acquérir d'autres pathologies d'ordre psychiques (qui peuvent être considérées comme telles si elles mettent en danger vous-même ou vos proches, ou vous handicapent dans vos activités).
Le bon sens nous guide dans le choix de ses activités équilibrantes pour les nerfs : il faut qu'elles soies complémentaires et relaxantes (la pratique intensive des percussions et de la batterie est assez " stressante "). Exemple : intérêt pour les autres arts (culinaires, cinématographiques, plastiques, dramatiques, etc., qui offrent de surcroît un intérêt cathartique et jouissif), les sciences, ce qui, à mon avis, est en plus très utile pour l'inspiration et la culture générale, les jeux (intéressant pour la logique, la sociabilité, l'observation, la vivacité d'esprit et le défoulement (notre société de consommation est propice au développement des frustrations, les jeux opèrent des " transferts " efficaces)), le dialogue (qui intervient en outre à tous les niveaux pour améliorer la qualité de notre vie, à condition de respecter des règles de courtoisie élémentaires (pas si évident pour tout le monde)). La liste est ici loin d'être exhaustive, c'est à chacun de faire preuve d'imagination et de jugement pour l'allonger à l'envie.
Marc de Douvan
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