English

: : : Leçons : : La dissociation des frappes

La dissociation des frappes ou gestes de frappe, consiste à n'utiliser qu'une seule articulation pour mouvoir la baguette ou la pédale de batterie.

Cette technique d'avant-garde mise au point avec les débuts du jazz et la batterie moderne, permet non seulement d'acquérir un meilleur contrôle et une plus grande efficacité (moins fatiguant) mais aussi de reposer certains muscles pendant que d'autres travaillent en alternant les différentes frappes dissociées (voir notamment à la leçon " L'alternance des frappes ").

Chaque frappe implique un usage et une puissance différents, qui permettent d'élargir le champ des dynamiques (de pianissimo à fortissimo), de mieux les maîtriser (roulement d'une main, accents) d'optimiser les postures (chaque instrument étant à une place différente) et de rendre les passages et roulements plus ergonomiques (épaules ou coudes pour passer d'un instrument à l'autre, poignets ou doigts pour les roulements sur un même instrument).

Notez bien que pour isoler le mouvement par une seule articulation, il faut bloquer toutes les autres, c'est-à-dire exercer une contraction des muscles antagonistes (exemple : blocage du coude par contraction équivalente du triceps et biceps de l'arrière bras).

Enfin, pour vous exercer, exécuter d'abord les gestes décrits très lentement en prenant bien conscience de la posture de tout le corps.

Nous allons lister et décrire, chaque type de frappe, de l'amplitude la plus grande à la plus petite, articulation par articulation, d'abord les bras, puis les jambes :

Remonter
1 : frappe de l'épaule (ou bras entier) :

Muscles sollicités pour le mouvement: pectoraux (poitrine), deltoïdes (épaules), dorsaux (dos), trapèze (cou)

Le bras tendu, serrez fortement la baguette, poignet coude et doigts bloqués (ou presque). Il s'agit de la frappe la plus puissante et fatigante pour le bras, à utiliser avec la plus grande parcimonie (aussi pour favoriser le contraste et préserver les oreilles). Travaillez également les passages, très lentement, d'un instrument à l'autre, dans des éloignements extrêmes, là où ce geste ample est nécessaire (exemples: de la caisse claire aux cymbales crashs, du charleston à la ride ou au tom basse, etc.). L'épaule est la seule articulation à rotule du bras, ce qui implique de pouvoir accéder facilement à toutes les directions. En tout état de cause, vous devez pouvoir accéder à tous les instruments sans faire pivoter le dos (ou alors exceptionnellement), ce qui serait très dommageable à la longue (voir à " Posture " et " Blessures ").

Levée
: : cliquer pour agrandir : :
Frappe
: : cliquer pour agrandir : :


2 : frappe du coude (ou avant-bras seul) :

Muscles sollicités : biceps et triceps de l'arrière bras, et autres muscles de l'arrière bras, de l'épaule et du dos pour faire pivoter le coude sur le côté (coiffe des rotateurs, deltoïde, dorsaux, grand rond, etc.)

L'arrière bras doit se tenir le long du buste, collé et parallèle, comme au repos. Apprenez à relaxer les muscles non utilisés et à ne pas les exposer à d'inutiles pressions du poids (ce qui serait le cas si vous levez les coudes ici). Les poignets, doigts et épaules sont ici bloquées. Cette frappe est utile pour donner de la puissance (exemple, rim-shot pleine peau ou accents ou crescendo) ou pour passer sur des instruments voisins de la caisse claire (tom basse, cymbale ride, charleston, toms médiums sur grosse caisse, etc.).

Levée
: : cliquer pour agrandir : :
Frappe
: : cliquer pour agrandir : :


3 : frappe du poignet (ou main seule) :

Muscles sollicités : ceux de l'avant-bras

Le coude et l'épaule, sont bloqués dans la position qui permet le meilleur emplacement pour la frappe du poignet seul, ce qui implique différents angles suivant les instruments frappés. Plus on se rapproche de 180 °, moins c'est fatiguant, à cause du poids, mais la position des genoux imposent généralement au moins un angle de 90° du coude, même pour la caisse claire (instrument le mieux placé et le plus joué). Utilisez les épaules en dernier recours seulement (crash, dôme de ride, etc.) à cause de la fatigue que cela induit (soulèvement du bras entier). Les doigts enserrent bien la baguette encore (à la manière d'un marteau) mais une position paume vers le sol est plus ergonomique pour cette frappe, contrairement à toutes les autres, où la paume doit être placée verticalement (pouce le long du manche).

Levée
: : cliquer pour agrandir : :
Frappe
: : cliquer pour agrandir : :


Remonter
4 : frappe des doigts :

Muscles sollicités : ceux de la main et de l'avant-bras

La " pince " doit être ici la plus libre possible, avec la deuxième phalange du pouce et de l'index. S'entraîner d'abord avec des mouvements du pouce et de l'index seuls, puis chaque doigt en plus séparément, et enfin l'ensemble des doigts en même temps (certains batteurs, alternent chaque doigt, à la manière d'un pianiste ou d'un guitariste de flamenco). Optimisez l'utilisation du rebond, en donnant juste une impulsion de doigts synchrone pour que la baguette aille vers le bas (frappe), et en ne déplaçant la baguette que dans un plan parfaitement vertical. Le rebond suffira à effectuer la levée de la baguette (armement). Pincez enfin votre baguette au point de rebond idéal. Ce point est différent pour chaque baguette à cause des différences de densité et de forme de chaque modèle. C'est pourquoi je conseille de choisir rapidement un modèle de baguette et de s'y tenir, pour ne pas perturber l'acquisition des réflexes (à tester en laissant rebondir la baguette en équilibre sur l'index seul).

Cette frappe est la plus difficile à maîtriser, et ne permet pas de changer facilement de position (sauf par un mouvement conjoint des autres articulations, d'où la nécessité de tout travailler). Par contre elle permet une grande vélocité et endurance. Terry Bozzio, Vinnie Colaiuta et Dave Weckl et Dennis Chambers sont des grands maîtres de cette technique, dans la lignée des batteurs de jazz classiques (Gene Krupa, " Papa " Jo Jones, Louie Bellson, Buddy Rich, Art Blakey, Max Roach, etc.).

Levée
: : cliquer pour agrandir : :
Frappe
: : cliquer pour agrandir : :


5 : frappe en pointe (de la jambe) :

Muscles sollicités : abdominaux internes (ilio-psoas), fessiers, cuisse

Pointe tendue (contraction continue du mollet), levée de l'ensemble de la jambe. Coup le plus puissant (" kick ") et le plus fatiguant. Certains batteurs l'utilisent même en double pédale (athlétique !) comme Mike Terrana ou Horacio Hernandez. Il est très utile pour jouer du charleston (" chick ") rapidement sans faire saturer les cymbales (" crash "). Ce coup est très utilisé par les batteurs de jazz d'avant-garde comme Tony Williams, Jack de Johnette ou Dave Weckl, car il donne l'illusion d'un chabada toujours continu tout en utilisant les deux mains sur les tambours.

6 : frappe talon posé au sol (de la pointe (attention à la confusion des termes)) :

Muscles sollicités : le mollet et le devant du tibia

Le talon ne décolle jamais ici du sol, et la jambe est donc toujours reposée et immobile. C'est une frappe qui permet endurance et surtout finesse des dynamiques et vélocité, très appréciée des jazzmen. Personnellement, je l'utilise aussi en double pédale, ce qui est peu fréquent, car rarement utilisé en contexte " soft " (je m'en sers pour la samba notamment, et pour jouer les rudiments avec les pieds et les mains, lors de solos).

Certains batteurs utilisent également la frappe du talon, pointe posée, pour marquer les silences (c'est le cas de Max Roach avec le pied gauche sur la pédale de charleston).

N.B. : toutes ces frappes doivent être maîtrisées avant de commencer à travailler leur alternance, qui fait l'objet d'une autre leçon : " alternance des frappes " (jeu en talon-pointe, ou poignet-doigts (" roulement à une main ") par exemple).

Remonter

Marc de Douvan, déc. 2005.

© 2005 Marc de Douvan Crédits Mentions légales