Jacques Hélian, Tino Rossi, Luis Mariano, Charles Trénet
Né en 1921 en Italie, Dante Agostini commence la batterie et l'accordéon à 5 ans. Il devient le batteur de l'Olympia et des Folies Bergères, où il accompagne les "pop stars" des années 50. Fan de be-bop et de Kenny Clarke, son principal inventeur, installé à Paris (Kenny inspira aussi une des plus importantes méthodes de batterie américaines : « Advanced Techniques for the Modern Drummer » de Jim Chapin, 1948), Dante auto édite sa première méthode de batterie « moderne » (et non de batterie « classique » ou militaire, avec un musicien par instrument, le premier en France) en 1967, en étant coauteur avec Kenny Clarke. Ce sera le début d'une longue série, jusqu'à sa mort en 1980. Il ouvre la première école de batterie en France (à Paris, 1964), avec le soutien de Kenny Clarke, qui devient son ami, et en fera par la suite ouvrir de multiples autres. C’est avec ses premiers élèves (dont Bertrand Renaudin, qui lui suggère notamment l’écriture universelle des doigtés (droite/gauche) avec des ronds et des points), qu’il élabore ses premières partitions manuscrites. Bien qu'assez pionnières (avec beaucoup de batterie rock des origines (années 1950)), j'estime que ses méthodes sont aujourd'hui dépassées notamment par leur approche anhistorique, peu expliquée, peu ordonnée, très axée sur la caisse claire seule, le déchiffrage de longs morceaux (alors que tous les batteurs improvisent, depuis les origines de la batterie moderne), le jazz et le rock, en omettant la double grosse caisse, l'héritage culturel afro latin (cubain, brésilien, antillais, etc., souvent déformé ou absent), et le funk (fusion, jazz-rock, hard rock, avec l'usage de notes fantômes), pourtant déjà très présents dans les années 1960-70 et assez incontournables pour un "bon" batteur digne de ce nom aujourd'hui. La « méthode » Agostini présente finalement très peu de concepts musicaux originaux et créatifs, et une culture assez limitée de l'instrument, avec une approche que je trouve peu efficace et « asservissante » (déchiffrage de morceaux note pour note avec beaucoup de redondances, au lieu de décrire un vocabulaire, un système d’improvisation ou de composition, ce qui justifiait aussi son extraordinaire volume). Tout ceci explique sûrement que Outre Atlantique, les méthodes Agostini n'aient eu que très peu de succès. Mes propres méthodes tentent de remédier à toutes ces lacunes, comme la plupart des méthodes récentes et mêmes anciennes, américaines (comme la première méthode de batterie moderne de Gene Krupa, de 1938 présentant tous les rudiments américains (contrairement à Dante Agostini) et des prolongements basiques sur un tambour (avec notamment des rythmes syncopés non militaires, typiques du jazz) et le set entier, la technique "Moeller" avec des photos expliquées ainsi que des solos historiques). Enfin, je fais remarquer que Ted Reed, professeur dans une école de musique à Broadway, publia en 1958 (9 ans avant la première méthode Agostini) une méthode encore inexistante dans son genre (conçue d'abord pour ses propres élèves en batterie de jazz), intitulée "Progressive Steps to Syncopation for the Modern Drummer", que je trouve vraiment très similaire à beaucoup de méthodes Agostini: exercices rythmiques (toutefois sans doigté, ce qui peut expliquer le succès encore actuel aux U.S.A. de "Stick Control for the Snare Drummer" de G.L. Stone (1935), centré sur ce sujet) avec en plus une construction bien plus ordonnée (et donc vraiment progressive) et logique (basée sur les mathématiques combinatoires, pour prendre en compte toutes les possibilités et accéder à une totale liberté de jeu, approche que j'ai moi-même adoptée mais de manière plus mathématique et condensée encore, et avec beaucoup d'explications et développements sur les applications possibles à la batterie moderne, ce que Ted Reed omet complètement). Il faut toutefois savoir que la première méthode de tambour au monde, « Orchésographie » (1588), écrite par un français, Thoinot Arbeau, pour décrire la musique de danse, la danse et la musique militaire et son usage, présente déjà une approche rythmique mathématique combinatoire (aussi sans doigtés laissant libre son interprétation suivant le tempo, la technique du joueur et l'envie, sans description des rudiments qui étaient transmis oralement au départ, et seront décrits dans des méthodes bien ultérieures). Un an plus tard, Ted Reed sortait encore une méthode intitulée: "Drum Solos and Fill-ins for the Progressive Drummer" (uniquement dans un style jazz très classique, et cette fois avec doigtés complets mais très basiques et pas typiques du jazz) qui aurait bien pu aussi servir de modèle à Dante. Lors de sa publication, cette méthode faisait sans doute un bon complément à la méthode de Jim Chapin précitée, qui traite uniquement du sujet de l'indépendance en batterie jazz Be-Bop. Les méthodes de Ted Reed sont par contre encore aujourd'hui des best sellers aux U.S.A., ce qui peut paraître mérité vu leur antériorité et leur aspect bien ordonné (mathématique et donc universel) et synthétique. Toutefois elles sont aussi très basiques et à mon avis nettement insuffisantes en terme d'information pédagogique sur la batterie moderne aujourd'hui, notamment en matière de culture, car la musique (sous-entendue "créative" pour moi) ne peut se limiter aux mathématiques et à quelques références anciennes (ses méthodes n'abordent absolument pas encore les rythmes latins et la double grosse caisse, ou le funk, puisque postérieur, et une foule de concepts pourtant rudimentaires en batterie moderne et même classique).
Marc De Douvan, publication: 3 mars 2009.
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